Cette audience fait suite aux deux courriers adressés par l’Appep au ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse le 22 juillet et le 3 octobre 2023.
Participaient à cette audience :
Pour l’Appep : Karine Cardinal (vice-présidente), Marie Perret (présidente), Vincent Renault (vice-président).
Pour le Cabinet :
Cécile Laloux (conseillère pédagogique du ministre).
Pour la Dgesco :
Marie-Carmen Dominguès (Mission de pilotage des examens), Agnès Poussin (Bureau des lycées)
Pour l’Inspection générale :
Frank Burbage (doyen du groupe philosophie de l’Inspection générale)
Nous remercions notre interlocutrice de nous recevoir et en venons immédiatement aux points que nous souhaitions aborder.
Le calendrier du baccalauréat
Nous rappelons que le vivier des correcteurs étant restreint en philosophie, la charge de correction qui incombera aux professeurs sera insupportable. Des collègues s’attelleront à la correction des copies de philosophie le 19 juin ; dès le lendemain s’ajouteront les copies d’HLP ; les correcteurs devront, dans le même temps, assister aux réunions d’entente et d’harmonisation de philosophie et d’HLP ; quatre jours après, certains devront commencer à siéger dans les jurys du GO, sans compter qu’ils participeront ensuite aux délibérations et feront passer les épreuves du second groupe. Ce calendrier est proprement intenable. Nous ne comprenons pas que l’épreuve de philosophie ne se tienne pas plus tôt : à tout le moins, elle aurait pu avoir lieu le 14 juin, jour de l’épreuve écrite de français.
Cécile Laloux met en avant qu’avec le déplacement des épreuves de spécialités en juin, le ministère nous a entendus : conformément à ce que nous demandions, l’épreuve de philosophie n’est plus isolée. Elle nous assure que le ministère est également conscient des difficultés que ce nouveau calendrier posera aux correcteurs de philosophie. Aussi y réfléchit-on sérieusement à des propositions construites garantissant l’accompagnement des professeurs de philosophie dans leurs multiples opérations de correction. Il ne saurait être question, dit-elle, que la lourdeur des tâches conduise à les tenir éloignés de l’épreuve de grand oral. Nous lui demandons de préciser quelles mesures sont envisagées et quand nous en aurons connaissance. Nous n’obtenons aucune réponse précise sur ces deux points.
Notre interlocutrice insiste sur le caractère définitif du nouveau calendrier. Aucun ajustement n’est à espérer. Il faut en effet, dit-elle, maintenir les élèves le plus longtemps possible en cours. Nous lui faisons remarquer que, dans certains établissements, il est déjà prévu que les cours s’arrêteront, en première et en terminale, le 8 juin. Cécile Laloux est très surprise : elle nous assure que les chefs d’établissements seront rappelés à leur devoir de maintenir les cours au-delà du 8 juin.
Marie-Carmen Dominguès explique pourquoi l’épreuve de philosophie n’a pas été fixée le 14 juin, jour de l’épreuve écrite de français : il fallait éviter que les candidats libres ne passent deux épreuves de quatre heures le même jour. Elle ajoute que la concentration des épreuves a été d’autant plus voulue par le ministère que, comme les années précédentes, la procédure parcoursup sera suspendue pendant toute leur durée, et qu’il ne fallait pas prolonger inutilement cette suspension. Nous déplorons qu’une fois encore, les contraintes organisationnelles, en particulier celles induites par parcoursup, prévalent sur la sérénité des conditions de correction.
La réévaluation du coefficient affecté à l’épreuve de philosophie
Nous rappelons notre demande d’une revalorisation significative du coefficient de l’épreuve de philosophie dans la voie générale et dans la voie technologique.
Cette demande est très attendue par nos collègues. Les professeurs de philosophie ont le sentiment légitime que leur discipline a été affaiblie par la réforme du lycée. Leurs services se sont émiettés. Leur charge de correction s’est considérablement alourdie pendant l’année scolaire, et désormais au mois de juin. Le coefficient de l’épreuve est dérisoire par rapport à la quantité de travail qu’ils fournissent auprès de leurs élèves pour les préparer à cette échéance et pour assurer la correction de l’examen.
Ce coefficient, en outre, ne récompense pas suffisamment le travail patient et exigeant que les élèves accomplissent pendant toute l’année pour se préparer à une épreuve qui est celle de la maturité intellectuelle.
La petitesse de ce coefficient, enfin, apparaît comme une double anomalie. Il est inférieur au coefficient affecté à l’épreuve du grand oral, épreuve pourtant bien moins exigeante que l’épreuve de philosophie. Il est aussi inférieur au coefficient des épreuves anticipées de français.
Nous demandons l’inversion des coefficients du grand oral et de l’épreuve de philosophie. Nous expliquons les deux raisons qui la justifieraient pleinement : l’épreuve de philosophie est une épreuve écrite qui évalue un enseignement représentant quatre heures hebdomadaires dans la voie générale, deux dans la voie technologique, alors qu’aucune heure n’est dévolue à la préparation du grand oral ; et cette inversion permettrait de rééquilibrer la répartition des coefficients entre les enseignements de spécialités (50)1 et la philosophie.
Notre interlocutrice nous invite à formuler cette intéressante proposition dans le cadre de la mission « Exigence des savoirs ».
Demandes relatives à HLP
Nous rappelons les données de la DEPP qui montrent que cette spécialité est un échec. Celui-ci s’explique en partie par des programmes inadéquats : trop lourds et peu lisibles, ils exigent une érudition inaccessible à des lycéens. Et ces programmes si prolixes donnent lieu à des sujets très aléatoires. Nous demandons un changement radical de la nature des programmes : des programmes de notions, plus simples, plus intelligibles, et plus accessibles aux élèves.
Nous expliquons que la nature même de l’épreuve à laquelle cette spécialité donne lieu est aussi un repoussoir. Boiteuse, elle exige des candidats qu’ils réalisent en deux heures deux exercices qu’ils apprennent à réaliser en quatre heures dans les enseignements de français et de philosophie. Les candidats, de surcroît, n’ont pas le choix de leurs sujets, contrairement à ce qui se pratique en HGGSP et en LLCER.
Nous demandons que l’épreuve de spécialité consiste en un type d’exercice déjà pratiqué par ailleurs, plus familier aux candidats : l’explication en quatre heures d’un texte philosophique ou littéraire laissé au choix du candidat.
Sur ce point comme sur le précédent, nous sommes invités à exposer nos suggestions à la mission « Exigence des savoirs ».
Nous portons à la connaissance de notre interlocutrice la situation qui nous a été signalée par un professeur de philosophie enseignant dans un lycée privé sous contrat de l’académie de Montpellier : son chef d’établissement refusant de lui donner la moitié des heures d’HLP, c’est son collègue de français qui, chaque année, assure l’intégralité de cet enseignement en première et en terminale. Cécile Laloux s’en étonne. Elle rappelle que la répartition égale de l’horaire entre le professeur de philosophie et de français est réglementaire. Elle précise que les établissements privés sous contrat sont tenus par les textes ministériels.
Le dédoublement de la deuxième heure de philosophie dans la voie technologique
Nous exposons, une fois encore, la nécessité du dédoublement de la deuxième heure de philosophie dans la voie technologique. Nous insistons sur l’enjeu démocratique et républicain de ce dédoublement.
Une nouvelle fois, nous sommes renvoyés à l’autonomie des établissements : pour répondre à la spécificité des publics, les organisations pédagogiques ne doivent pas être figées nationalement. Nous objectons que les professeurs de philosophie sont rarement entendus, quand bien même ils parviennent à prouver que cette demande répond à un réel besoin pédagogique. Nous demandons un geste du ministère : celui-ci pourrait au moins rappeler aux chefs d’établissement l’importance de ce dédoublement. Nous ne sommes pas entendus sur ce point.
L’EMC
Nous déplorons que l’EMC soit trop rarement attribué aux professeurs de philosophie qui en font la demande. De fait, cet enseignement est le plus souvent confié aux professeurs d’histoire-géographie.
Notre interlocutrice reconnaît l’intérêt d’une approche philosophique de cet enseignement. Elle nous invite à adresser nos propositions au CSP qui travaille actuellement à la redéfinition du programme d’EMC du cours préparatoire aux classes terminales.
Le Capes
L’Appep juge la nouvelle épreuve d’admission (dite « épreuve d’entretien ») très problématique. Celle-ci a créé un précédent : les candidats ne sont plus jugés sur leurs connaissances disciplinaires, mais sur leur expérience personnelle, leur motivation, leur aptitude à s’approprier et à transmettre les valeurs de la République. Nous jugeons légitime la position du jury du Capes de philosophie qui, pour donner à cette nouvelle épreuve une assise disciplinaire et pouvoir l’évaluer avec équité, a tenu à ce que les candidats analysent les cas pratiques qui leur sont soumis à la lumière de leurs connaissances philosophiques. Nous déplorons que sa présidente, Sylvia Giocanti, n’ait pas été reconduite dans sa fonction pour avoir posé cette norme.
Cécile Laloux nous renvoie aux textes réglementaires. Nous faisons remarquer que cette norme posée par le jury ne contrevient nullement à ceux-ci. Notre interlocutrice nous renvoie alors à la souveraineté de la DRH : les jurys peuvent être reconduits… ou non. Nous n’en saurons pas davantage.
Nous remercions Cécile Laloux de nous avoir reçus.