L’APPEP a pris connaissance du projet de programme pour l’enseignement de spécialité de la classe de première « Humanités, littérature et philosophie » (HLP) publié le 31 octobre 2018 par le Conseil supérieur des programmes (CSP), et prévu pour être soumis du 5 au 20 novembre à la consultation nationale en ligne des professeurs de philosophie.
L’APPEP a contesté l’existence et le projet de cette spécialité, insistant sur les difficultés de son articulation à l’enseignement commun et sur le besoin d’un enseignement approfondi de philosophie. Le projet qui est aujourd’hui présenté confirme malheureusement sa position.
Le rôle d’une association de professeurs de philosophie attachée au pluralisme doctrinal n’est pas de définir un contenu d’enseignement. Il lui revient en revanche de veiller à ce qu’un programme d’enseignement permette aux élèves de s’approprier les principes de la réflexion philosophique et garantisse la liberté pédagogique des professeurs. Il lui incombe également de s’assurer que les conditions de cet enseignement soient convenables.
La nature de l’enseignement
L’APPEP s’inquiète du caractère essentiellement historique du programme et de l’inévitable arbitraire des périodisations proposées au regard des thèmes retenus. S’il est indiqué que l’ancrage historique n’est pas conçu de façon rigide, une priorité est clairement affirmée. Compte tenu de l’ampleur du programme et de l’étroitesse de l’horaire, les rares excursions en dehors de la période de référence seront marginales ou superficielles.
Au-delà des périodisations contestables, l’enjeu est la possibilité d’un enseignement de philosophie. En abandonnant un programme défini par l’étude des notions les plus communes et les plus ordinaires, on expose des élèves de 16 ans à mimer une érudition évidemment inaccessible à la grande majorité d’entre eux. Un cours de philosophie ne peut s’adresser réellement aux élèves de lycée et leur permettre de s’approprier son contenu qu’à partir d’une réflexion sur leurs expériences et leurs représentations. Ainsi ce programme découragera les élèves, qui se réfugieront dans divers manuels et mémentos leur présentant des cours et des corrigés tout faits, ou, plus simplement, les incitera à choisir d’autres spécialités. À ceux qui auront choisi en Première la spécialité HLP, la philosophie leur apparaîtra semblable à un domaine étranger dont ils auront entendu parler à partir d’œuvres compliquées.
Les conditions de l’enseignement
Soucieuse des conditions de l’enseignement de la spécialité bi-disciplinaire HLP, l’APPEP soutient le principe d’une épreuve d’examen bi-disciplinaire et d’un cadrage national et égalitaire de l’horaire.
C’est la raison pour laquelle l’APPEP a constamment demandé que l’épreuve d’examen soit composée de deux exercices distincts, l’un de lettres, l’autre de philosophie, chacun corrigé par un professeur de la discipline concernée, condition nécessaire à un enseignement disciplinaire qui ne soit pas un méli-mélo indigeste pour les élèves. Elle attendait du projet de programme qu’il confirme un engagement oral du CSP sur ce point et s’inquiète qu’il n’en soit pas fait mention dans le programme. Elle s’étonne que l’épreuve ne soit pas définie.
L’APPEP prend toutefois bonne note que sa demande d’un cadrage national et égalitaire de l’horaire a été prise en compte par le CSP, même si la préconisation aurait pu être plus ferme. Il est en effet impératif que tous les élèves ayant choisi la spécialité « Humanités, littérature et philosophie » aient la garantie inscrite au BOEN de disposer chaque année du même horaire en lettres et en philosophie : 2 h en Première, et 3 h en Terminale, afin d’être convenablement et équitablement préparés à l’examen. Sans quoi, les élèves inscrits en Première déserteront massivement la spécialité HLP l’année suivante, par crainte d’une épreuve à la préparation aléatoire.
L’APPEP appelle tous les professeurs de philosophie à participer massivement à la consultation organisée par le ministère. Quel que soit l’avis de chacun sur le programme, il est important que le ministère aperçoive que la profession est mobilisée pour manifester son attachement à l’enseignement de la philosophie.
Elle attend du ministère qu’il rende publique une synthèse détaillée de la consultation et demande au CSP d’en tenir le plus grand compte.