Dès 2013, l’Appep avait pris la mesure des enjeux de l’enseignement moral et civique (EMC) en organisant un colloque sur cette question1. Elle n’a eu de cesse, par la suite, de produire des ressources2et des contributions3, d’organiser des échanges avec d’autres disciplines4, de recueillir les témoignages des professeurs de philosophie et d’avancer des propositions en vue de surmonter les obstacles au développement de cet enseignement5. Forte de cet important travail, l’Appep souhaite faire part de ses constats et de ses propositions au groupe chargé de la rénovation des programmes.
L’EMC est un enseignement global et structurant, assuré du CP jusqu’à la classe terminale. Il n’est pas en lui-même une discipline et n’a pas vocation à le devenir. Toutes les disciplines sont en effet susceptibles d’éclairer les objets du programme et de répondre à ses finalités : aider les élèves à devenir des citoyens responsables et libres, et contribuer à forger leur sens critique. Pour que l’EMC ne se confonde pas avec un catéchisme républicain ou une morale prétendant sermonner ou dogmatiser, cet enseignement doit s’appuyer sur des savoirs disciplinaires rigoureux et exige des conditions à la hauteur de ses objectifs.
À cet égard, la première urgence est de revaloriser l’horaire dévolu à l’EMC. Celui-ci ne permet pas, en l’état, de répondre à l’ambition affichée par le président de la République et le ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse. Cet horaire dérisoire fait apparaître l’EMC comme un enseignement accessoire, voire purement récréatif. L’horaire doit donc être porté à une heure hebdomadaire pour tous les élèves. En outre, pour renforcer l’efficacité et la pertinence de cet enseignement qui exige des élèves un travail personnel de documentation et ménage une large part au dialogue, il est pédagogiquement impératif que les cours d’EMC aient lieu en demi-groupes.
La deuxième urgence consiste à revoir les modalités d’évaluation de l’EMC. Compte tenu de son horaire inévitablement contraint, l’expérience a montré qu’il n’était pas pertinent d’évaluer cet enseignement par une note. Il nous semble par conséquent plus judicieux de proposer une appréciation générale par trimestre.
La troisième urgence est de rendre effective la vocation pluridisciplinaire de l’EMC, laquelle ne se confond pas avec une interdisciplinarité brouillonne qui serait chronophage pour les professeurs sans être d’un quelconque bénéfice pour les élèves. Dans les faits, cet enseignement demeure la chasse gardée des historiens-géographes. Une telle situation mutile cet enseignement en privant les élèves des éclairages que toutes les disciplines sont susceptibles d’apporter. Pour que l’appel à diversifier les approches ne soit pas condamné à rester un vœu pieux, l’institution doit assurer une répartition plus équilibrée des heures d’EMC.
Ainsi les recteurs devraient-ils, à la demande du ministre, inciter officiellement les proviseurs à confier prioritairement cet enseignement en terminale aux professeurs de philosophie volontaires. Ceci n’exclut d’ailleurs pas la possibilité de le leur attribuer également en première et en seconde.
L’Appep tient à souligner l’apport irremplaçable de la philosophie à cet enseignement. Outre l’approche conceptuelle, synthétique et critique qu’elle offre aux élèves, la philosophie apprend à distinguer la nature, les finalités et les modalités des différentes discussions (entre amis, en classe, en politique ou encore en science). Elle leur donne l’occasion d’un retour réflexif sur les finalités de l’école républicaine et le lien entre savoirs et liberté. Elle leur permet, enfin, de questionner les fondements des valeurs républicaines et d’examiner ce qui les rend légitimes.
Il est impératif, enfin, de simplifier les programmes d’EMC et de les rendre plus lisibles. L’actuelle présentation sous forme d’axes, de questionnements, de notions à acquérir et d’objets d’enseignement possibles génère une confusion entre contenus programmatiques et ressources pédagogiques, empêche de hiérarchiser les objectifs et de savoir précisément de quoi les élèves doivent être instruits. L’Appep est à la disposition du CSP pour lui soumettre ses propositions.
- https://www.appep.net/colloque-de-lappep-sur-lenseignement-moral-et-civique-16-novembre-2013
- https://www.appep.net/table-des-matieres/ ; https://www.appep.net/ressources-pour-les-cours-demc/
- https://www.appep.net/ressources-pour-les-cours-demc/ ; https://www.appep.net/le-metier-de-professeur-de-philosophie/enseignement-moral-et-civique/
- https://www.appep.net/4464-2/
- https://www.appep.net/category/emc/