En janvier dernier, l’enseignement transdisciplinaire du fait religieux, en faveur duquel plaidaient les rapports Joutard en 1989 et Debray en 2002, a reçu une nouvelle impulsion dans le cadre de la « grande mobilisation de l’École pour les valeurs de la République ». Le ministère de l’Éducation nationale appelle en effet à renforcer l’enseignement laïque du fait religieux dans la formation initiale des enseignants, et à mettre à la disposition des professeurs des ressources pertinentes sur la question.
L’enseignement du fait religieux, qui n’est évidemment pas un enseignement religieux, vise à introduire l’objectivité distanciée du savoir dans un domaine dominé par les affects et les certitudes immédiates. C’est pourquoi les professeurs de philosophie ont un rôle à jouer : bien loin de se faire les propagandistes, ou les adversaires, des religions, ils doivent éclairer les enjeux conceptuels et existentiels des notions de transcendance, de foi, de rite, etc.
Ils y sont prêts : la religion est depuis quarante ans au programme des séries générales, et la distinction entre raison et croyance est étudiée depuis dix ans dans la voie technologique. Le récent programme d’enseignement moral et civique (EMC) permet de réfléchir au besoin de laïcité dans un contexte de pluralité des croyances.
Peut-on pour autant participer sans réticence à cette « grande mobilisation » ? Son objectif est la pacification des esprits, comprise sur le mode de la pacification sociale, bien plutôt que leur culture. Que vaut cette invocation à la vertu pacificatrice du savoir dans une École où celui-ci est généralement écarté au profit des savoir-faire, des savoir-être et des compétences ? Il ne suffit pas de décréter un enseignement du fait religieux pour que des élèves qui refusent certains cours de S.V.T. ou d’histoire-géographie acceptent de prendre du recul avec leurs croyances.
Il faut donc affronter directement ce qui fait obstacle à la transmission du savoir.
C’est pour réfléchir à ces questions, et aux manières pour cet enseignement de trouver sa place en contrepoint du cours de philosophie, que l’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public organise cette journée d’étude.
Enregistrement du colloque
Philippe Gaudin, Institut européen en sciences des religions, Histoire et enjeux de la question de l’enseignement des faits religieux. Le cas particulier de la philosophie.
Denis Kambouchner, Paris 1, Des religions dans la philosophie.
Discussion
Pierre Windecker, Lycée Édouard-Branly, Nogent-sur-Marne (hon.), Le problème posé par la religion dans le cours de philosophie et dans le cadre de l’enseignement moral et civique.
Charles Coutel, Institut d’étude des faits religieux,L’enseignement des faits religieux: l’importance des controverses.
Discussion